Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

L'aventure "delta" avec Emilie et Rémi

Publié le 11 Mai 2014

Tout commença bien tranquillement sous un resplendissant soleil bucarestois : retrouvailles autour d'un petit verre en terrasse dans le vieux centre de la capitale, promenade dans le parc auprès duquel nous avions garé le camion (à quelques kilomètres du centre-ville) puis apéro dinatoire composé de sushis faits maison -et oui, Alan a découvert que rouler des feuilles d'algues n'était pas si difficile et depuis, ne s'en lasse pas- agrémenté d'un excellent champagne que nos amis rémois avaient ramené tout exprès!


Le deuxième jour fut à peine plus agité : balade en vélo dans les quartiers de Bucarest. C'est une ville étrange mélangeant d'ignobles immeubles sortis tout droit de l'époque communiste avec des architectures très modernes et d'autres, rescapées de l'avant-guerre. Beaucoup de grands espaces verts très agréables où se promènent une foule de gens à tout moment de la journée. Au milieu de tout ça se trouve le grandiloquent palais de Ceausescu, construction absolument titanesque aux proportions démesurées : une superficie de 60 000 m2, douze étages, des milliers de pièces toutes plus grandioses les unes que les autres. Rêve démentiel d'un dictateur qui ne l'aura même pas connu achevé : Ceausescu est exécuté en 1989, la construction n'est aujourd'hui toujours pas achevée et abrite actuellement l'assemblée parlementaire et le sénat.


C'est le soir de ce deuxième jour que nous avons pris la décision d'aller faire du bateau sur le delta du Danube. Pourquoi : outre que c'est un site naturel protégé par l'unesco, sa situation géographique (à mi distance entre l'équateur et le pôle), en font le terrain privilégié de toute sorte d'oiseaux migrateurs, dont notamment les pélicans ,qui y séjournent entre mi-avril et mi-mai. C'était donc la période rêvée! Après s'être procuré licences de navigation et carte détaillée du delta (qui compte une nombre infini de canaux dans lesquels il est facile de se perdre), nous nous sommes rendus à Murighiol, l'un des derniers village du bras sud du Danube accessible par la route.


C'est à partir de là que le séjour devint un peu moins tranquille...


Trouver le bateau fut tout une affaire. Si les bords du Danube sont inondés de touristes en été, ce n'est pas le cas en mai où Murighiol est simplement un village de pêcheurs qui ne parlent ni le français, ni l'anglais. Il a d'abord fallu trouver le petit port ce qui nous a valu quelques bonnes heures de marche. Puis il a fallu se faire comprendre ce qui nous a pris le reste de la journée! En effet, si les quelques personnes à qui l'ont s'est adressées finissaient par déduire de nos gestes désespérés que nous voulions un bateau pour naviguer sur le Danube, elles entendaient toujours un bateau à moteur avec un guide. Or, nous voulions naviguer sans guide et donc, puisque qu'aucun de nous n'avait de permis bateau, avec un bateau sans moteur, une barque quoi! Heureusement, nous avons fini par rencontrer Ivan pêcheur roumain qui, en tant qu'ex-travailleur en RDA -parlait un peu allemand et comprit le poussif " wir wollen ohne dich fahren", (autrement dit : "nous voulons partir sans toi") que nous avons fini par faire ressurgir de notre mémoire lycéenne!


Et ça a marché : le lendemain 8h00, Ivan nous attendait avec une vieille barque à deux rames, des gilets de sauvetage et une écope -dont nous aurions l'usage puisque nous nous apercevrions assez vite que la barque prenait l'eau...


Après avoir chargé tente, sacs de couchage, ravitaillement et appareils photos, nous avons enfin pris place à bord de l’embarcation, laissant sur le rivage un Ivan quelque peu anxieux (durant nos préparatifs, il était venu à deux reprises nous demander si nous savions naviguer puis si on connaissait le chemin pour finalement nous dessiner un plan sommaire des lieux et nous donner son numéro en cas de problème). Il faut dire que quatre petits français (dont Emilie, enceinte jusqu'au cou, ai-je omis de préciser) s'embarquant à la rame et sans guide pour 40 kilomètres de route sur le Danube (ne riez pas, nous avions sérieusement envisagé les 80 km!), ça en a fait sourire plus d'un! Mais pas nous, tout encore aux délices de ce début d'aventure, nous jetions un regard extasié sur le beau héron cendré campé au sortir du port...


L'extase prit fin quelques minutes plus tard, à la sortie du premier canal, quand nous avons réalisé qu'il nous fallait remonter le Danube- c'est à dire contre le courant- jusqu'au canal suivant. Déjà, naviguer avec des rames ultra-lourdes en bois datant des années 20, ce n'est pas une partie de plaisir, mais à contre-courant c'est carrément la lutte! Nous avons compris notre douleur dès les premières heures et mis au point, du même coup, notre organisation du travail : un à l'avant qui rame (et qui souffre en silence), un à l'arrière qui barre (comme il peut avec un bout de bois qui pèse une tonne), un autre au milieu qui aide à la pagaie ( la nôtre que nous avions heureusement prise au cas où) et le dernier qui écope. Postes en alternance avec, malgré tout, une tendance masculine pour la rame à l'avant.


Après de louables efforts, nous avons finalement réussi à atteindre le second canal que nous avons ensuite tranquillement descendu, cette fois, dans le bon sens. Temps splendide, flore luxuriante, faune foisonnante -dont les fameux pélicans que nous avons vu en abondance-, l'ambiance fut à la détente jusqu'à l'arrivée au premier lac où un vent terrifiant rendait la traversée à la rame quasiment impossible! Seule solution raisonnable : revenir sur le canal, trouver un endroit pour établir notre campement et réessayer tôt le lendemain en espérant que le vent ne soit pas encore levé. Le problème, c'est que la remontée du canal à contre-courant s'avéra encore plus difficile que celle du Danube : on s'épuisait pour avancer de quelques mètres! Voyant nos efforts désespérés, des touristes avec guide et bateau à moteur -des parisiens qui, lorsqu'ils comprirent que l'on était français, s'esclaffèrent en nous interrogeant, ô combien délicatement, "des français, mais qu'est-ce que vous foutez-là"- nous remorquèrent au peu plus haut sur le canal.


Notre première nuit dans le delta aurait pu être très plaisante si :


1) nous avions réellement la tente 4 places que nous croyions avoir emportée et non une ridicule tente 2 places
2) il n'existait pas tant de moustiques sur le Danube
3) il ne fallait pas se réveiller à 5 heures le lendemain matin pour partir avant la levée du vent et avoir une chance de traverser les lacs


Au lieu de quoi, après une visite, il est vrai, émerveillante des alentours (arbres majestueux étendant leur feuillage au-dessus de ruisseaux chantants, étendues d'eau secrètement encerclées de roseaux sauvages desquels s'élevaient les bruissements d'ailes d'oiseaux invisibles, chants réguliers des batraciens en tout genre rythmant l'absolue tranquillité des lieux... le paradis vert), un repos bien mérité sous le soleil danubien et un bon repas devant un feu de bois, nous avons enduré des tourbillons de moustiques -surtout celui qui dormait dans le hamac- et très mal dormi - je déclare qu'il est radicalement impossible de dormir à trois dans cette ridicule tente.


Dans ces conditions, croyez-moi, le "réveil" à 5h00 ne fut pas si difficile. Nous avons donc repris la route des lacs à l'aube, sans une once de vent et dans un silence dérangé seulement par les vols des nombreux oiseaux qui peuplent ces lieux. Là encore, paysages enchanteurs : lumière rose-orangée baignée dans une légère brume tombant tout doucement sur le canal, avancée silencieuse sur l'eau tranquille avec, au-dessus de nos têtes, les vols en formation des pélicans et des cigognes et, par endroits, le regard curieux d'une petite aigrette toute blanche. On oublia d'un seul coup les mésaventures de la veille et notre courte nuit : ça en valait la peine.La traversée des lacs, au milieu des roseaux et sous des nuées d'oiseaux en tout genre -dont nos fameux pélicans aux becs immenses-, fut aisée et c'est donc bien tranquillement que nous avons poursuivi notre chemin, sous un magnifique soleil, à travers les nombreux petits canaux parsemant le delta.


La difficulté survint en fin d'après-midi quand, malgré de longues heures de rame, notre point d'arrivée (à nouveau le bras du Danube) demeurait invisible. S'ensuivirent plusieurs heures douloureuses où, tout en continuant de ramer, seuls et isolés au milieu du delta, nous nous posions des questions existentielles type : "Se pourrait-il que nous nous soyons trompés de route et que nous soyons complètement perdus dans l'infernal dédale des canaux danubiens (évidemment jamais correctement fléchés) ? " ou "Est-il possible que nous ayons gravement mésestimé les distances à parcourir et, dans ce cas, pourrons-nous atteindre notre destination avant la nuit sachant qu'il est radicalement impossible d'accoster avant ? ". Interrogations qui en entrainèrent une autre, plus pénible: " Dans l'hypothèse où nous ne trouvons pas notre point d'arrivée avant la nuit, est-il envisageable de dormir à quatre dans la barque qui prend l'eau? ". Bref, l'angoisse...


Enfin, après plus de 10 heures de rame éreintantes - je vous laisse imaginer notre état d'autant que nous nous étions levés à 5 heures-, nous apperçumes enfin le bras du Danube! Sauvés!


Notre campement, offrant une vue imprenable sur un Danube totalement indifférent à nos pérégrinations, fut promptement monté et la soirée fort agréable : les moustiques se tinrent tranquilles, les deux garçons prirent les hamacs ce qui nous laissait un espace suffisant pour dormir sous la tente et, la tsuiska aidant (gnôle locale à base de prune), tout le monde dormit très bien!


Restait à affronter notre troisième et dernier jour sur le Danube dont l'objet consistait à remonter -toujours à contre-courant- le fleuve jusqu'à notre port d'attache. Ce ne fut évidemment pas de tout repos mais, maintenant entraînés et chacun à son poste, nous sommes venus à bout du Danube... à bout de force!


Je crois que nous n'avons jamais été aussi heureux de retrouver notre camion et, après une douche bien méritée, nous avons passé une soirée délectable à observer, bien tranquillement installés devant une délicieuse tajine, les allers et retours des petites embarcations flottant sur notre ancien adversaire.


Puis, comme il restait quelques jours avant le départ de nos amis, nous avons décidé de prendre le ferry -la rame, c'en était fini pour nous- jusqu'au magnifique petit village de Stanfu George situé à la croisée du delta et de la mer noire. L'idée était de prendre une chambre chez l'habitant et, après une visite des alentours, de diner dans un petit restaurant histoire de fêter notre aventure danubienne. Nous avons trouvé la chambre chez l'habitant... mais pas le restaurant! Moyennant quoi, après une promenade quelques peu éprouvante (nous nous sommes égarés et sommes rentrés au village à la nuit tombée je vous passe les détails), nous avons dû improviser un pique-nique nocturne sur le parking de la seule épicerie ouverte du village qui n'avait même plus de pain à vendre! Le diner fut frugal et nous nous sommes réconfortés avec quelques verres de vodka (l'alcool du coin car nous étions alors tout près de la frontière ukrainienne) au petit bar de pêcheurs heureusement ouvert!


Le temps de reprendre le ferry, le camion puis de passer une dernière soirée à Bucarest, le moment était venu de repartir pour Emilie et Rémi! Séjour riche en émotions et pas vraiment reposant pour nos copains rémois censés être en vacances! Mais quand même, c'était bien chouette!


Emilie et Rémi repartis, nous prenons quelques jours de repos bien mérités à Bucarest avant de partir à l'assaut des Carpates!

Bucarest
BucarestBucarest

Bucarest

le palais de Ceaucescule palais de Ceaucescu

le palais de Ceaucescu

les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)
les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)
les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)

les rameurs dans l'effort (désolée pour les têtes coupées mais si vous cliquez sur la photo, vous l'aurez en entier !)

les campementsles campementsles campements
les campementsles campements

les campements

le deltale deltale delta
le deltale delta
le deltale delta
le deltale deltale delta

le delta

le village de Stanfu Georgele village de Stanfu George
le village de Stanfu George
le village de Stanfu Georgele village de Stanfu George

le village de Stanfu George

Commenter cet article
J
Pendant la lecture, je sentais bien les &quot;ampoules&quot; venir, le stress monter! <br /> Nous attendions le récit, et c'est encore Peggy qui a gagnée la découverte.<br /> Gros bisous d'amour
Répondre
R
Buena ziwa les p'tits zamis!<br /> Trop bon cette petite retrospective! Je gratte encore mes boutons de moustiques et mes cloques sont à peine cicatrisées... Vive l'aventure! Bon vent à tous les 2.
Répondre
L
Tu ne nous avais pas dit que tu préparais Koh-lanta...
Répondre